
ARTICLES EXTRAITS DE LA PRESSE AFRICAINE DEPUIS 1997
Octobre 1997
Initialement prévue pour septembre, la présidentielle a été reportée au mois d'octobre. Face à une opposition qui appelle au boycott, on assiste là à un véritable forcing de la part du pouvoir qui voudrait en finir au plus vite avec un scrutin qu'il est sûr de remporter. Sans avoir résolu le contentieux né des dernières législatives du mois de juin, et dans un climat politique particulièrement tendu, sur fond de tensions sociales et de difficultés économiques persistantes, le pouvoir s'apprête à affronter une opposition qui désormais se déploie sur de multiples fronts, y compris le front armé. Ainsi, une certaine opposition "radicale", qui a définitivement renoncé à croire aux vertus d'un scrutin régulier au Cameroun, choisit désormais les voies de 1'intimidation armée. On signale notamment l'existence d'un groupe armé camerounais, basé au Tchad, composé de 2 835 hommes. On précise également que, pour l'heure, les hommes de rang de ce groupe ignorent officiellement le théâtre des opérations auxquelles ils se préparent. Les services du Renseignement camerounais sont également parfaitement informés des activités de "groupes séparatistes anglophones" dont la base arrière est signalée au Nigeria (un conflit frontalier se prolonge entre ce pays et le Cameroun). Des contacts auraient été récemment établis à Paris entre ces hommes que l'on dit "particulièrement aguerris" et des marchands d'armes. Avec ces tensions, le Cameroun risque de compléter la liste des pays qui font actuellement de l'Afrique centrale le point chaud du continent.
Février 1998:
Le chef de l'état a remporté
l'élection présidentielle sans les problèmes qu'on
aurait pu voir et tient à montrer qu'il garde le contrôle
des initiatives. La nouvelle équipe gouvernementale et les proches
collaborateurs de celui qui a encore 7 ans devant lui ne marque en aucun
cas une rupture.
Au milieu de noms inconnus au bataillon,
ou du lot d'éléments à caser pour maintes raisons
- répartition ethnique ou régionale, tributs à payer
à diverses obédiences - quelques personnalités méritent
une mention spéciale.
Hamidou Marafat. C'est le nouveau
secrétaire général de la présidence, un poste
de pouvoir grisant et périlleux. Sous Paul Biya, l'astuce consiste
à parer à ses légendaires absences sans lui donner
l'impression de le remplacer, ni de vouloir "prendre sa place". Un homme
a particulièrement défrayé la chronique à ce
poste: le Pr. Titus Edzoa, qui avait sombré dans un affairisme enragé.
Il est actuellement en prison. Hamidou Marafat, qui succède à
Amadou Ali, un homme originaire du nord, comme lui, est précédé
par une flatteuse réputation de discrétion et d'efficacité.
Cela fait longtemps qu'il était déjà dans l'ombre
un des plus proches conseillers du président.
Amadou Ali. Avec Marafat, il fait
partie de la "Garde nordiste" du président. Il est nommé
ministre d'Etat chargé de la Défense. En quelques années,
il est devenu un des hommes de confiance d'un chef d'Etat qui pratique
allégrement l'alliance "nord-sud". E René Owona. Secrétaire
général adjoint. Cet homme cultivé et effacé
est avant tout l'un des meilleurs économistes du gouvernement.
Ancien ministre du Développement industriel, il a été
longtemps conseiller spécial, fonction qu'il continuera sans doute
d'exercer à son nouveau poste officiel.
Edouard Akame Mfoumou. Il a été
pleinement reconduit dans ses fonctions de ministre d'Etat chargé
des Finances, alors que certaines "affaires" révélées
par la presse ont pu faire croire qu'il risquait la disgrâce. Les
excellents résultats qu'il a obtenus dans les négociations
avec les institutions monétaires internationales ont remis les pendules
à l'heure et rappelé la longue et solide carrière
au service de l'Etat que l'homme a déjà derrière lui.
Martin Belinga Eboutou.
Longtemps directeur du protocole,
puis du cabinet civil, ce diplomate a été affecté
à ses premières amours, la diplomatie. Il est désormais
ambassadeur du Cameroun auprès de l'ONU à Washington.
Grégoire Owona
Venu de la société
civile et peu sectaire, cet ancien chef d'entreprise a mis son sens de
la répartie et du concret au service du RDPC, le parti de Paul Biya,
il a occupé le poste de secrétaire général
adjoint. Désormais, il goûte à la fonction ministérielle
dans le rôle de chargé des relations avec le parlement.
Augustin Kontchou Kouomengni
Ministre d'Etat chargé des
Affaires étrangères. Après avoir été
ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, fonction
qu'il remplissait de manière fort percutante, le voilà chargé
de la diplomatie d'un pays dont le rayonnement n'a cessé de décliner.
Malgré les détracteurs, il a prouvé Sa loyauté
au "régime du renouveau" dont il sait défendre le bilan en
toute circonstance même les plus délicates.
Joseph Owona. Cet infatigable bosseur
va devoir dompter des Lions...
L'entrée au gouvernement
d'un des principaux chefs de l'opposition, Bello Bouba Maïgari, ancien
premier ministre d'Ahidjo, a bien entendu provoqué la colère
des radicaux. Néanmoins, la physionomie du pouvoir ne change pas
de manière dratique; il devient surtout plus stable.
Homme des plus secrets, Paul Biya
reste largemment méconnu de ses compatriotes et de ses pairs après
16 années de pouvoir. Les conseils de ministres sont rares et les
audiences très comptées, pouratnt la machine cameroun tourne....Paul
Biya ne pratique pas de pouvoir familial, n'entretient pas de réseau,
ce que l'on peut apprécier ou déplorer, et ne fréquente
pas ses homologues dont certains se plaignent publiquement. Il aurait néanmoins
un bon contact avec Eyadéma, avec lequel il a échangé
des visites.
Mars 1998
Le 15 janvier 1998, une décision
de justice rendue à Douala a débouté l'Etat du Cameroun
de sa demande d'annulation de l'acte notarié portant cession des
12 % détenus par l'ex-Office national de commercialisation des produits
de base (ONCPB) dans le capital de la Société de développement
du coton (Sodécoton), au profit d'une structure privée, la
Société mobilière d'investissement du Cameroun (Srnic).
C'est le tout premier verdict des trois procès intentés en
justice, à la fin de mars 1995, par l'Etat du Cameroun contre certaines
sociétés publiques et la Smic, à propos des 49 % de
ses actions cédées à cette dernière.
L'affaire Sodécoton, faut-il
le rappeler, remonte au 14 janvier 1995. L'ex-premier ministre, Simon Achidi
Achu, informe alors Justin Ndioro, ministre chargé de l'Economie
et des Finances, de la notification falte par le chef de l'Etat pour la
vente de la totalité des actions détenues par l'Etat dans
la Sodécoton. La notification de l'accord présidentiel sera
aussi faite aux responsables de l'ex-ONCPB, de la Société
nationale d'investissement (SNI) et de la Caisse de stabilisation des prix
des hydrocarbures
(CSPH). Ces trois sociétés
publiques représentaient les intérêts de l'Etat, dans
le capital social de l'entreprise productrice de fibre blanc à Garoua.
L'opération d'achat faite
par la Smic, et qui paraît anodine, sera pourtant dénoncée,
le 30 mars 1995. Et par la voix du ministre de l'Economie et des Finances.
Motif invoqué la transaction a ignoré, d'après le
communiqué du ministère, la procédure en vigueur en
matière de privatisation des entreprises publiques et parapubliques.
Une procédure qui exige le lancement d'un appel d'offres pour la
sélection des repreneurs potentiels. De plus, le ministère
déclare que la cession s'est déroulée à l'insu
même du directeur général de la Sodécoton. Autant
d'arguments pour justifier l'annulation de la transaction passée
entre l'Etat et la Smic.
Mais, l'argument déterminant
qui a justifié cette annulation est la sous-estimation du prix de
rachat des actions de l'Etat dans le capital de la Sodécoton. Lors
de la création de la société en mai 1974, le titre
valait 10000 F CFA. Mais, depuis lors, elle s'est considérablement
développée. Lorsque l'Etat envisage de privatiser la Sodécoton
en 1994 pour la rendre encore plus efficace, il y injecte la bagatelle
de 48 milliards de F CFA pour apurer ses dettes et autres arriérés
de paiement. L'opération s'avère bénéfique
car l'entreprise réalise un chiffre d'affaires de plus de 60 milliards
de F CFA et dégage de substantiels bénéfices. Du coup,
la valeur de l'entreprise augmente considérablement. Au point que
sa capitalisation représente, à l'heure actuelle, plusieurs
fois ce qu'elle était il y a vingt ans.
Le cours de l'action devrait se
situer, selon les experts, entre 40000 et 70000 F CFA. Or, la Smic - dont
les propriétaires sont principalement de grands
dignitaires du Rassemblement démocratique
du peuple camerounais (RDPC), le parti au pouvoir, et des notables du Grand
Nord camerounais où est implantée la Sodécoton - a
racheté les actions de l'Btat à un cours nettement inférieur.
Pour éviter la spoliation
de l'Etat, le président Paul Biya était intervenu vigoureusement
à la mi-mars 1995 pour arrêter la transaction. Dans la foulée,
il avait signé, le 29 mars suivant, un décret pour réorganiser
la Mission de réhabilitation des entreprises du secteur public et
para-public. Depuis lors, les opérations de privatisation ne sont
plus directement rattachées au ministère de l'économie
et des Finances, mais sont placées sous l'autorité du président
de la République.
Mais, certains observateurs voient
en l'annulation du rachat des actions de l'Etat par la Smic la main invisible
de la Compagnie française de développement des fibres textiles
(CFDT). Ils affirment que cette dernière n'aurait pas du tout apprécié
l'opération. Ils brandissent comme preuve la visite éclair
de deux jours au Cameroun de l'ex-ministre français chargé
de la Coopération, Rernard Debré, à la veille de la
décision du gouvernement camerounais d'annuler la transaction.
La Smic estime cependant que tout
s'est déroulé dans la légalité et saisit la
justice. Après moult tergiversations, le tribunal vient de lui donner
gain de cause. Mais, dans l'attente des deux autres verdicts, les bailleurs
de fonds piaffent d'impatience. Et pour cause : le processus de privatisation
de la Sodécoton accuse un grand retard. Selon des sources proches
du ministère de l'Economie et des Finances et de la mission résidente
de la Banque mondiale, la mise en vente de la société était
prévue pour le 31 décembre 1997. Affaire à suivre...
CRÉÉE LE 10 mai 1974,
la Société de développement du coton du Cameroun (Sodécoton)
est une société d'économie mixte au capital de 4,529
milliards de F CFA réparti en 452900 actions de 10900 F CFA chacune.
Il est détenu par le trésor public (22 %), trois entreprises
publiques - la SM (25 %), la CSPH et l'ex-ONCPB (12 % chacun) - et la société
française CH)T (39 %).
La Sodécoton a pour objet
principal de promouvoir la culture du coton, de produire de l'huile et
des tourteaux et, d'une façon générale, de contribuer
à la modernisation de l'agriculture.
Implantée dans le Nord-Cameroun,
elle emploie 1500 salariés et fait vivre plus de 200990 familles
dans une région qui compte 3 millions d'habitants. Elle dispose
d'un outil de production performant composé principalement de huit
usines d'égrenage et de deux huileries.
La Sodécoton produit quelque
153000 tonnes de coton-graine, 63000 tonnes de fibres, 76900 tonnes de
graines à triturer, 11,5 millions de litres d'huile et 35000 tonnes
de tourteaux. Son chiffre d'affaires dépasse 60 milliards de F CFA.
Ses principaux marchés se situent en Extrême-Orient où
elle exporte, bon an mal an, 57000 tonnes de fibres de coton.
C'est la révolution dans les
institutions supérieures du Cameroun. A la fin janvier 1998, les
critères de recrutement des enseignants, ainsi que ceux régissant
leur avancement, ont été définis par un arrêté
du ministre chargé de l'enseignement supérieur, Jean-MarieAtangana
Mébara. D'après ce texte, tout postulant à la carrière
d'enseignant devra être désormais titulaire d'au moins un
diplôme d'ingénieur de conception. Et à défaut,
avoir satisfait à l'examen de fin de première année
de doctorat, pour ce qui est du grade d'assistant.
Parallèlement, l'accès
au grade supérieur sera dorénavant soumis à l'approbation
du Conseil consultatif des institutions universitaires (CCIU). L'arrêté
ministériel précise que le postulant à l'échelon
supérieur devra produire au moins deux rapports scientifiques au
CCIU et obtenir l'avis favorable de 3 enseignants spécialisés
dans la discipline choisie. Pour justifier la portée de la mesure,
le ministère de l'Enseignement supérieur a évoqué
le souci de l'Etat d'améliorer le profil de carrière ainsi
que la situation des enseignants. La nouvelle a été accueillie
favorablement dans les milieux universitaires.
Pour un professeur d'économie
à l'université de Douala, " l'arrêté ministériel
augure certainement des lendemains meilleurs. Nous avons l'impression que
l'ère du mépris et de la clochardisation des hommes du temple
du savoir va disparaître
Finis donc les aléas des
promotions dites " normales " et " exceptionnelles
qui, selon le personnel enseignant,
avaient instauré un climat délétère au sein
des institutions universitaires d'une part, et entre celles-ci et leur
organisme de tutelle, d'autre part.
LITIGE CAMEROUN-NIGERIA
Les premières audiences sur
le litige frontalier entre le Nigéria et le Cameroun ont eu lieu
devant la Cour Internationale de Justice (CIJ) de La Haye en mars. Ce litige
dont l'enjeu, depuis plusieurs années, est la presqu'île de
Bakassi, est-il enfin sur la voie de la résolution? Il serait grand
temps. Ce différend a envenimé les rapports entre les deux
voisins, des rapports pourtant bons de tous les autres points de vue, et
ce depuis presque quarante ans. On peut croire que le Nigeria et le Cameroun
n'ont jamais vraiment voulu se faire la guerre, meme lorsqu'ils y semblaient
tout à fait prêts, comme en mai
1991.
L'histoire qui a produit ce différend
a également créé beaucoup de facteurs d'unité
entre les deux pays. l'a minorité anglophone du Cameroun des provinces
du Nord-Ouest et du Sud-Ouest se souvient des quarante ans d'union administrative
avec le Nigéria, suite àla guerre de 1914-18 et à
la division entre la France et la Grande-Bretagne de l'ancienne colonie
allemande du Kamerun. Quand l'heure des indépendances est venue,
une partie du Cameroun sous tutelle britannique - British Northern Cameroons
- choisit dans un référendum l'union définitive avec
le Nigéria, ce qui provoqua un ressentiment aigu de la part du gouvernement
du Cameroun ex-français dirigé par Ahmadou Ahidjo. Mais le
British Southern Cameroons choisit l'union avec le Cameroun francophone
pour devenir dès le 1er octobre 1961 le Cameroun Occidental.
Les Anglophones ont gardé,
depuis, des liens très diversifiés avec le Nigéria
tout en renforçant leurs liens avec le reste du Cameroun réunifié.
Surtout ceux de la génération qui a connu l'administration
britannique, laquelle ne faisait pratiquement pas de séparation
entre le territoire sous mandat ou sous tutelle d'une part et le Nigéria
d'autre part. Bon nombre d'éminents Camerounais anglophones ont
été formés dans les universités nigérianes.
Solomon Muna fut d'abord ministre au Nigéria, avant de devenir vice-président
du Cameroun.
Ces liens existent toujours. Des
Camerounais ont continué d'aller travailler et étudier au
Nigéria - et il est intéressant de noter que l'actuel ministre
des Affaires Etrangères du Nigéria chargé du dossier
Bakassi, Tom Ikimi, a fait ses études secondaires à Buéa.
Il y a jusqu'à 2 millions de Nigérians au Cameroun, surtout
au Cameroun Occidental et dans la grande capitale économique de
Douala. Le gouvernement camerounais ne les a jamais inquiétés,
ce qui contraste avec les grandes expulsions d'étrangers
africains du Nigéria en 1983 et en 1985. Il a été
bien dit que l'unité africaine politiquement recherchée
par les dirigeants existe déjà dans la
vie quotidienne des populations
africaines. Cela est particulièrement très vrai pour le Nigéria
et le Cameroun. La longue frontière est traversée sans cesse
de part et d'autre. Les visas sont abolis depuis plus de 20 ans entre les
ressortissants des deux pays. De plus, il est très facile de traverser
la frontière clandestinement et beaucoup l'ont fait pour plusieurs
raisons, notamment l'extrême difficulté d'obtenir un passeport
camerounais sous Ahidjo et la fermeture par le Nigéria de toutes
ses frontières entre 1984 et 1986. Cette fermeture était
assez théorique dans le sens Nigéria-Cameroun; comme toujours
depuis des années, circulaient des marchandises ainsi que des voyageurs,
et des voitures de fabrication nigériane étaient de fabrication
nigériane étaient conduites au Cameroun pour être vendues
clandestinement. La contrebande la plus connue depuis plusieurs années
est celle de l'essence nigériane appelée "fédéral",
vendue au Cameroun jusqu'aux portes de la raffinerie nationale de Limbé
dont elle concurrence gravement les ventes. Au nord, il y une zone officieuse
de libre circulation de biens et de personnes couvrant des régions
du Nigéria, du Cameroun et du Tchad.
Sans aller jusqu'à admirer
la contrebande, on doit toujours rappeler les nombreux liens quotidiens
entre ces deux pays qui ont tous de bonnes raisons de chercher une résolution
du litige sur la presqu'île Bakassi.
Bakassi est en effet un groupe d'îlots
couverts de palétuviers au milieu de nombreuses criques débouchant
dans la mer de la Baie d'Ambas. Il couvre environ 1,000 km2. Ses habitants,
peu nombreux, sont des pécheurs dont on peut croire qu'ils connaissent
beau-coup mieux les eaux de la région que les différentes
versions du tracé de la frontière internationale.
l'a raison de l'incertitude que
la CIJ est appelée à résoudre vient de l'histoire
coloniale. Avant la guerre de 1914-18, aucun accord sur ce qui était
alors la frontière coloniale anglo-allemande n'avait été
ratifié, et les travaux de délimitation qui avaient cependant
été faits ne s'étaient pas étendus jusqu'à
la région marihme. Plus tard, pendant toute l'époque du Mandat
et du Tutelle les Britanniques qui administraient leur portion du Cameroun
comme partie intégrante du Nigéria ne se souciaient pas du
tout d'une frontière sans importance pour eux, mais destinée
à redevenir une frontière internationale en1961.
Comme dans d'autres cas de litiges
frontaliers africains les gouvernements indépendants laissaient
aller la situation incertaine pendant quelque temps. Mais en 1974, le Nigéria
fit renaître la question de la frontière en étendant
ses eaux territoriales maritimes à l'époque où l'essor
de la production pétrolière du Nigéria, que les débuts
de la production camerounaise allaient suivre en 1977, fit croire que la
région de Bakassi est riche en pétroles: une idée
qui domine les arguments d'un côté et de l'autre jusqu'alors.
Le président Ahidjo alla parler du différend avec le général
Yakubu Gowon, alors chef d'état nigé rian, à Kano
en août 1974, ensuite à Lagos, ensuite en juin 1975 à
Maroua au Cameroun.
Ce qui tut annoncé après
ces entretiens fut un accord de s'abstenir de toute recherche de pétrole
dans une zone large de quatre kilomètres située à
deux kilomètres des deux côtés de la frontière.
Cet accord était évidemment insuffisant pour la région
où on n'était pas d'accord sur la frontière. A ce
propos il a souvent été dît depuis que les deux chefs
d'état conclurent un accord secret qui, d'après certaines
rumeurs aurait fixé la frontière du côté nigérian
de Bakassi. On n'a jamais annoncé officiellement une telle décision
et Gowon l'a démentie. 'S'il y a eu une telle décision en
faveur du Cameroun le Nigéria l'a évidemment violée,
car ses forces armées occupent la plupart du territoire disputé
maintenant.
D'après l'histoire officieuse,
Gowon aurait cédé le territoire au Cameroun en récompense
du soutien d'Ahidjo au gouvernement fédéral nigérian
dirigé par Gowon pendant la guerre civile de 1967-70. S'il n'a effectivement
pas fait ce geste, on peut dire du côté camerounais que le
Nigéria aurait dû le faire, qu'il devrai t le faire depuis,
parce qu'effectivement, le président Ahidjo accordait un soutien
réel au gouvernement nigérian pendant la guerre du Biafra.
On doit rappeler à cet égard
qu'au temps de cette guerre, le gouvernement Ahidjo ne s'était pas
départi de son amertume dû à la décision du
British Northern Cameroons de se joindre au Nigéria. Il avait porté
plainte devant la CIJ contre un référendum qu'il estimait
truqué. Sans succès (en effet, ce n'est pas la première
fois que ces deux pays se retrouvent devant cette instance). En 1968, Ahidjo
pouvait toujours parler de "nos frères séparés de
la terre-mère". Mais il choisit néanmoins le côté
du gouvernement nigérian contre le Biafra, allant historiquement
à l'encontre de la grande sympathie de l'opinion publique camerounaise
- anglophone et francophone - pour le Biafra... Et ce, en dépit
du vibrant soutien de la France aux Biafrais. Le gouvernement du Général
de Gaulle, dont le principal exécutant en politique africaine était
feu Jacques Foccart, a sans doute cherché àramener le Cameroun
du côté du Biafra. Foccart ne l'a pas directement avoué
dans ses mémoires mais il y a reconnu qu'Ahidjo était "ombrageur
en tout ce qui touchait à la souveraineté nationale". Ahidjo
l'a montré à propos de la guerre biafraise.
En mai1981, la mort de cinq soldats
nigérians au combat avec les forces camerounaises à Bakassi
provoqua une crise qui vit monter des passions guerrières au Nigeria.
En offrant les excuses officielles du Cameroun et en récompensant
les familles des soldats
morts Ahidjo évita une confrontation
grave ans que le litige frontalier soit résolu pour
autant. Pendant cette crise de 1981,
et encore en mai 1996, le Cameroun
chercha de l'aide militaire de la
France avec laquelle il avait maintenu des relations cordiales malgré
les désaccords déjà cités. D'une
méfiance globale envers la France, le Nigeria protesta contre cette
"ingérence" française.
Peu après sa prise du pouvoir,
le régime militaire du général Sani Abacha envoya
des renforts à Bakassi en décembre 1993. Une nouvelle confrontation
dangereuse entre les forces des deux pays s'ensuivit avec quelques escarmouches,
et le Cameroun décida alors (février 1994) de chercher une
résolution du litige par la Cour Internationale. Il y a eu des tentatives
de médiation aussi. L'OUA nomma le président Eyadéma
du Togo comme son médiateur entre le Cameroun et le Nigéria.
Il y eut aussi une tentative plus insolite de la part de l'ancien PDG d'Elf
Aquitaine, Loïk Le Floch-Prigent, qui d'après ses célèbres
révélations, voulait réconcilier les deux pays mais
en fut empêché par le premier ministre français Edouard
Balladur, pas favorable à une pareille "diplomatie parallèle".
Cette proposition de l'ancien PDG d'Elf peut se comprendre à cause
de l'importance de la production de pétrole pour cette société
dans les deux pays; en 1981, il avait tremblé pour la sécurité
de ses installations camerounaises proches de la frontière en cas
de guerre. Il est assez probable que la presqu'île disputée
près des zones de production pétrolières marines et
terrestres du Nigéria, du Cameroun et de la Guinée Equatoriale
recèle des ressources pétrolières. Les pétroliers
(dont EIf, assurément) attendent le règlement du litige pour
l'exploration de Bakassi.
La réaction du Nigéria
face au recours du Cameroun à la CH est étonnante.
Il a voulu refuser de porter l'affaire devant le tribunal de La Haye et,
en mars, son représentant est allé jusqu'à tenter
de récuser la compétence de la CH dans l'affaire Bakassi.
Son argument sera sans doute rejeté, mais on doit se demander pourquoi
le gouvernement Abacha l'a soutenu avec tant de ténacité.
Son avis selon lequel la CH ne doit pas examiner cette affaire parce que
les deux parties du litige en discutent entre eux depuis 24 ans n'a pas
de sens. Pour les états comme pour les individus, la justice civile
est là justement pour les cas où les deux parties n'ont pas
réussi à régler un problème entre eux. La CH
a réglé d'autres litiges frontaliers africains: entre la
Libye et le Tchad, entre le Sénégal et la Guinée-Bissau.
Pourquoi le Nigeria veut-il refuser sa juridiction?
Les anglophones soutiennent du coté
camerounais Paul Biya
INVESTISSEMENT FRANÇAIS AU CAMEROUN:
Le Centre français du commerce
extérieur (CFCE) a organisé dans ses locaux parisiens un
séminaire sur le Cameroun. Thème : "Vers ne reprise économique
saine et
durable, propice à l'investissement".
Le gouvernement camerounais a pris
la mesure de cet événement
car la France est le premier investisseur étranger du pays. "les
investissements français représentent plus de 20% des capitaux
investis dans l'économie du pays, lit-on dans un document remis
aux participants, et plus de la moitié des investissements étrangers.
" Forte d'une trentaine de personnes, la délégation officielle
camerounaise était conduite par le Premier ministre, Peter Mafany
Musonge. Il était accompagné de neuf ministres de son gouvernement.
Pas moins Plusieurs représentants du secteur privé
camerounais ont également fait le déplacement de Paris, dont
James Onobiono, président de Sitabac, M. Soheng, assureur, Françoise
Foning, présidente de l'association des femmes d'affaires africaines,
Kadji Defosso, industriel. Plusieurs responsables d'entreprises publiques
aussi, tel M. Cyrille Etoundi, PDG de Cameroon Airlines, et des représentants
de la Société immobilière du Cameroun.
C'est donc à une véritable
opération de séduction que se sont livrés les officiels
camerounais à l'endroit des investisseurs potentiels et des exportateurs
français. Un programme copieux attendait les participants, qui ont
tout de même payé 1800 francs français (180 000 Fcfa).
D'abord, la matinée a été consacrée à
la présentation de l'état actuel de l'économie camerounaise,
des réformes déjà entreprises et restant à
entreprendre, et des projets en cours et à venir. Peter Mafany Musonge
a rappelé son passé de chef d'entreprise "Je suis un des
vôtres, a-t-il déclaré aux
entrepreneurs presents". Il a plus
insisté sur la bonne tenue des fondamentaux de 1'écono mie
camerounaise, qui conduit a un regain de confiance entre le gouvernement
et le secteur privé le fait que la mise en oeuvre du cinquième
programme d' ajustement structurel (1997-2000) se déroule normalement
selon le Fond monétaire international, est un argument de poids
pour le gouvernement. Rappelons que ce programme prévoit de porter
la croissance du Produit intérieur brut (PIB) réel à
5% par an au moins, de contenir l'inflation aux environs de 2% par an et
de stabiliser le déficit extérieur courant aux alentours
de 2% du PIB,
Parmi les éléments
qui freinent l'investissement au Cameroun, on trouve en bonne
place la corruption et le coût des facteurs de production. Beaucoup
d'entrepreneurs se plaignent du coût des dépenses inhérentes
à l'eau, l'électricité et au téléphone.
Sur ce point, le ministre d'Etat chargé du Développement
industriel et commercial, Bello Bouba Maigari, s'est voulu rassurant. "Le
gouvernement camerounais a opté pour une réforme et une adaptation
du cadre législatif et réglementaire, ainsi que et des Coûts
des facteurs de production en vue de répondre aux exigences du nouveau
contexte de l'économie mondiale."
Un point a également été
fait sur le programme de privatisation du gouvernement et sur les efforts
d'intégration régionale, respectivement par le ministre de
l'économie et des
Finances, Edouard Akamé Mfoumou
et son homologue des Investissements publics et de l'amenagement du territoire,
Justin Ndioro. Douze entreprises dont la Camair devraient basculer du côté
privé d'ici à la fin du plan triennal. Elles constituent
autant d'opportunités d'affaires pour es entrepreneurs français.
Mais pour attirer davantage d'investisseurs, le Cameroun devrait combler
son retard immense en matière d'infrastructure. de communication.
Ce qui aura un impact positif sur l'intégration régionale,
Après un déjeuner-débat en présence de Peter
Mafany Musonge, au cours duquel des ministres dits "techniques" (Postes
et télécommunication), Transports, Forets, Eau, Agriculture
et Tourisme) ont pris la parole, l'après-midi a été
réservé aux entretiens individuels. Bien que certains s'interrogent
sur le coût et les retombées d'une telle opération,
on peut néanmoins constater que des contacts ont été
noués. Seront-ils suivi d'effet?
Ce séminaire a néanmoins
permis à Akamé de préciser la position du gouvernement
camerounais sur les incertitudes que fait peser l'avènement de l'euro
sur le franc CFA depuis que se pose la question du passage à l'euro,
il y a comme une fébrilité qui s 'est emparée de tout
le monde. Beaucoup en sont venus à parler de dévaluation
du franc CFA. La dévaluation, a-t-il poursuivi, est utilisée
comme un outil pour permettre le redressement de certaines imperfections.
Grâce aux effets de la première dévaluation, les économies
de la région sont fortes 5,1% de croissance en termes réels
(en 1997) pour le Cameroun. Si on ajoute le taux d'inflation, on avoisine
les 10%. Rien ne devrait militer en faveur d'une mesure de réaménagement
monétaire qui aurait pour conséquence de revoir la valeur
du franc CF~ Plus on se confond en assurances et en démentis, a-t-il
ironisé, plus l'inquiétude est grande." Avant de conclure
que le gouvernement camerounais était opposé à une
quelconque dévaluation du franc CFA.
LE SUCRE DE YAOUNDE
L'AFRiQUE A déjà commençé
à tirer profit de la mondialisation en regroupant ses forces dans
les secteurs sensibles. La production et la commercialisation du sucre
-produit très concurrentiel - sont de ceux-là.
Ainsi, les responsables de six sociétés
sucrières du Cameroun, du Gabon, du Congo et du Tchad se sont retrouvés
dans la capitale politique camerounaise, à Yaoundé, du 3
au 5juin 1998, pour dresser un état des lieux de la filière
et envisager l'avenir ensemble, dans la perspective de la mondialisation.
La production sucrière repose
sur des méthodes de culture archaïques sans commune mesure
avec les ambitions affichées par les gouvernements.
L'exemple du Cameroun est éloquent.
Selon le directeur général de la Société sucrière
du Cameroun (Sosucam), Louis Yinda, la moissonneuse-batteuse reste une
denrée rare. La coupe encore du domaine de la machette. L'utilisation
des plants de cannes à sucre à cycle végétatif
court est ignorée en l'absence d'un institut de recherche approprié.
Seul le Tchad dispose d'un outil de ce genre, mais qui répond plus
aux exigences des cultures de zone sahélienne. Le personnel souffre
dans la plupart des cas d'une formation inadéquate.
Conséquences de toutes t
ces entraves : la production sucrière n'a jamais véritablement
décollé. En 1996-1997, elle a eté d'environ 160000
tonnes pour une demande globale de près de 240000 tonnes soit un
gap de 80000 tonnes
Une situation qui a oblige les opérateurs
économiques de la sous-région à importer du sucre
européen subventionné. En raison des coûts de production
très élevés dans les Etats, ces importations ont provoqué
une stagnation des ventes. "Certaines sociétés s'en sont
tirées d'ailleurs avec d'énormes pertes en termes financiers
", a expliqué Louis Yinda. Plusieurs résolutions ont été
adoptées à Yaoundé.
Elles ont laissé transparaître
une volonté commune de réaliser des économies d'échelle.
" Face aux défis de la mondialisation, a souligné Moussa
Faki de la Société nationale du Sucre -Tchad (Sonasu - Tchad),
il n'est plus raisonnable pour chaque entreprise de rester dans son petit
coin. Car en onctionnant de façon isolée, nous courons le
risque de disparaître."
Joignant la parole aux actes, Moussa
Faki a déclaré devoir mettre à la disposition des
autres membres du groupement le centre de formation de la Sonasu.
La plus grande innovation de Ces
assises reste le programme, certes ambitieux, de mécaniser les usines.
Ce programme se fera graduellement4 d'un Etat à un autre, compte
tenu des moyens financiers colossaux à dégager. Un label
de qualité pour faire face à la concurrence européenne
sera créé, en même temps qu'un institut de recherche
installé
au cameroun
JUSTICE INTERNATIONALE ET LITIGE CAMEROUN-NIGERIA
NIGERIA O - Cameroun 1. Ce n'est
pas du football, ce n'est pas un jeu. L'affaire est grave : elle concerne
le conflit frontalier, maritime et terrestre, qui oppose Abuja et Yaoundé,
et que le Cameroun a porté devant la Cour internationale de justice
(CU) de La Haye, malgré les réserves du Nigeria qui estimait
la Cour internationale incompétente et les demandes camerounaises
irrecevables. Après de longues délibérations, la CIJ
a finalement donné raison au Camerou en se déclarant, le
11juin 1998, compétente pour examiner désormais sur le fond,
le différend porté devant elle.
Elle a aussi jugé recevables
les demandes du Cameroun.
Cette décision, saluée
comme une " première victoire " par la presse camerounaise mais
qui ne porte pas sur le fond, ouvre désormais la voie à une
longue bataille juridique qui va se prolonger plusieurs mois.
C'est dans une requête du
29 mars 1994 que le Cameroun avait demandé à la CU de juger
quel est le détenteur légitime de la presqu'île de
Bakassi et de certaines îles du lac Tchad, et de définir le
tracé de la frontière terrestre et maritime entre lui et
le Nigeria. Le 13 décembre 1995, le Nigeria avait soulevé
8 exceptions préliminaires mettant on cause la compétence
de la Cour Les audiences publiques concernant ces " exceptions préliminaires
" s'étaient tenues entre le 2 et le 11 mars 1998.
Pour justifier son arrêt,
la CIJ a notamment considéré que le fait que les deux Etats
aient tenté de résoudre leur différend de façon
bilatérale n'impliquait pas que l'un ou l'autre ait exclu la possibilité
de porter celui-ci devant la Cour. Il n'existe ni dans la Charte de l'()nu,
ni ailleurs en droit international, de règle selon laquelle l'épuisement
des négociations diplomatiques serait un préalable à
la saisine de la Cour.
Depuis février 1994, des
affrontements armés entre les deux pays ont fait dans la région
de Bakassi des dizaines de morts et un nombre indéterminé
de prisonniers de guerre de chaque côté. La CIJ va maintenant
fixer les délais pour la suite de la procédure sur le fond.
L'arrêt définitif sur le fond n'interviendra pas avant de
longs mois.
NOMINATION DES GOUVERNEURS (Aout 1998)
Depuis la formation du nouveau gouvernement
en
décembre 1997, les observateurs
de la scène camerounaise attendaient un vaste mouvement touchant
les gouverneurs de province. Il faut dire que trois d'entre eux avaient
fait leur entrée au sein du gouvernement dirigé par Peter
Mafany Musonge : Enam
Ename Samson, gouverneur de l'Adamaoua,
en qualité de ministre de l'administration territoriale; Mouchipou
Seydou, gouverneur de l'Extrême-Nord, comme ministre des PTT; Bell
Luc René, gouverneur de l'Ouest, comme délégué
général à la Sûreté nationale.
Depuis décembre, l'attente
a été longue, mais pas inutile, puisque c'est une véritable
secousse qui a ébranlé la Haute Administration publique,
le 17juillet1998, lorsque le président Paul Biya a fait ses choix.
Seuls trois gouverneurs ont en effet été maintenus, dont
un seul au même poste Gounoko Haounaye, dans la province du Nord.
Oumarou Koué quitte la province du Centre pour celle du Sud. Il
est remplacé à son poste par Sigfried David Etamé,
qui quitte la province de l'Est. Les sept autres gouverneurs, tous jeunes
et anciens préfets, sont des nouveaux venus à ces postes
stratégiques.
La grande nouveauté est qu'il
s'agit d'un mouvement plus politique qu'admnistratif . En effet, un savant
dosage a été effectué, à l'image de celui qui
avait prévalu lors de la formation du gouvernement, afin que chaque
province ait l'un de ses ressortissants à un poste de gouverneur
C'est la province du Centre qui fait les frais de ce rééquilibrage
(elle ne dispose plus que d'un poste de gouverneur pour ses ressortissants,
contre trois précédemment), au profit des provinces de l'Est
et de l'Adamaoua. Autre leçon importante à tirer de ces nominations
le départ du vétéran de l'Administration camerounaise,
Koungou Edima Ferdinand, jusqu'alors gouverneur du Littoral.
Depuis le 17juillet1998, c'est donc
un ressortissant du Littoral qui est gouverneur du Centre, en la personne
de Sigfried David Etamé Massoma. Un fils de la province du Sud devient
gouverneur du Littoral : Emmanuel Ebang Otong (un ancien directeur des
affaiires politiques). Victor Yéné Ossomba, originaire du
Centre, devient gouverneur de l'Extrême-Nord.
Amadou Tidjani, de l'Adamaoua, est
le gouverneur de l'Ouest. Adrien Koumbo Jomague, natif de l'Ouest, est.
le nouveau gouverneur du Nord-Ouest. Acham Peter Cho, natif du Nord-Ouest.
prend son poste dans le Sud-Ouest. Bernard Claude Bend, de l'Est, prend
la direction de l'Adamaoua. Martin Tanyidiku Bayee Arikai, un enfant du
Sud-Ouest, devient le gouverneur de l'Est. Enfin, Oumarou Koué,
originaire du Nord, est le gouverneur de la provincc du Sud.
PIPELINE TCHAD-CAMEROUN
Après de nombreux contretemps,
dont la Banque mondiale et le Tchad se renvoient la responsabilité
sous l'oeil goguenard des pétroliers, le projet d'oléoduc
entre Doba et le port Camerounais de Kribi devrait être approuvé
dans les prochains mois. Les administrateurs de la Banque auraient dû
se prononcer sur le projet en décembre 1998, mais plusieurs dossiers
n'étant pas encore bouclés, la réunion a été
repoussée au mois d'avril de cette année. Encore s'agit-il
d'une hypothèse optimiste certains fonctionnaires sont convaincus
qu'elle ne se tiendra pas avant le mois de juin, voire de septembre.
Tout le monde attend la décision
de la Banque mondiale avant de se lancer. Le Tchad et le Cameroun n'ont
pas le choix leurs participations financières dans les sociétés
d'exploitation, la Tchad Oil Transportation Company (Totco) et la Cameroon
Oil Transportation Company (Cotco), dépendent directement de l'institution.
La Banque doit, en effet, consentir un prêt de 46 millions de dollars
à N'Djamena pour lui permettre d'acquérir 15 % de Totco et
5 % de Cotco, et un prêt de 69 millions de dollars à Yaoundé,
montant de la participation camerounaise au capital de Cotco (8,5 %). L'attitude
du consortium pétrolier, composé de l'américaine Exxon
(40 %), de l'anglo-néerlandaise Shell (40 %) et de la française
Elf (20 %), est plus ambiguè. Ces compagnies ne cessent de répéter
qu'elles n'entreprendront rien tant que la Banque mondiale n'aura pas donné
son feu vert, alors qu'elles pourraient très bien passer outre :
elles financent, à elles seules, 70 % de l'exploitation. Il n'en
reste pas moins vrai que les pétroliers ont besoin de la Banque,
appelée à servir de caution politique face aux gouvernements
tchadien et camerounais, de caution environnementale face aux associations
écologistes et de caution financière pour les banques qui
envisagent d'avancer des fonds au consortium.
Tout est donc suspendu au vote des
administrateurs...
Si ces derniers tardent à
se décider, c'est essentiellement pour deux raisons. D'abord, tout
projet approuvé par la Banque doit respecter un certain nombre de
critères environnementaux, ce qui n'est pas encore le cas de l'oléoduc
entre le Tchad et le Cameroun. À partir d'une étude commandée
au cabinet britannique Dames and Moore, les pétroliers ont élaboré
un stratégie environnementale et un plan de compensation pour les
personnes qui devront être déplacées ou expropriées
de leurs terres. Ces documents ont été soumis à la
Banque, qui a rendu ses conclusions à la fin du mois d'août.
A la surprise générale, les experts émettent de sérieuses
réserves, l'ouvrage ne leur paraissant pas " remplir les conditions
d'un projet Banque mondiale". Ils mettent notamment en cause le tracé
de l'oléoduc (" les solutions de rechange n'ont pas été
assez étudiées"), et s'inquiètent de l'impact sur
les sites naturels (" en particulier la vallée de Mbere, la forêt
de Deng Deng et la côte de Kribi ") et de ses conséquences
pour les populations (" celles qui vivent dans la forêt, mais également
les fermiers bantous établis à proximité du futur
ouvrage "). L'alerte a été suffisamment sérieuse pour
qu'une délégation composée de cadres d'Exxon et de
hauts fonctionnaires tchadiens et camerounais se précipite à
Washington pour défendre le projet.
A près trois jours de consultations
confidentielles, un participant a révélé que "plusieurs
propositions avaient été avancées en vue d'atténuer
l'impact de
l'oléoduc sur l'environnement
". Le tracé pourrait, en particulier, être partiellement renégocié.
Aujourd'hui, la grande majorité des problèmes sont, semble-t-il,
en voie de règlement, même Si certains phénomènes,
comme les fuites le long de l'oléoduc, sont a priori insolubles.
Parallèlement à ces
débats sur l'environnement, d'autres négociations, à
la fois plus cruciales et plus secrètes, ont eu lieu. La Banque
mondiale veut, en effet, s'assurer que les revenus du pétrole serviront
réellement au développement du
Tchad. Comme l'explique un fonctionnaire
de l'institution:
" La mission de la Banque est de
réduire la pauvreté. Nous ne pouvons financer un projet qui
s'écarte de cet objectif. " Il s'agit donc de contrôler l'utilisation
des recettes du pétrole. Celles-ci devraient provenir de la redevance
payée par le consortium sur ses revenus et de la fiscalité.
Calculées sur la base d'un baril à 15 dollars, elles seraient
de l'ordre de 2,7 milliards de dollars. Seul problème, le baril
est descendu sous la barre des 10 dollars et le pétrole de Doba
est actuellement évalué à 8 dollars le baril. Si cette
tendance se confirmait, les revenus du Tchad se réduiraient comme
peau de chagrin, puisqu'il est prévu que les taxes soient purement
et simplement suspendues en cas d'affaissement brutal des cours.
Si, à l'inverse, les prix
du brut venaient à remonter, le Tchad se retrouverait avec un énorme
pactole à gérer. Pour sensibiliser les responsables tchadiens
au problème du gaspillage des dividendes du pétrole, la Banque
mondiale a invité des fonctionnaires du Venezuela, du Koweit et
d'ailleurs à leur exposer les solutions mises en oeuvre par leurs
pays respectifs. Très vite, deux
modèles de gestion se sont
imposés. Dans le premier - de type, Si l'on veut, " koweitien "
-, l'argent est déposé dans une série de comptes à
l'étranger. Le
second est, en revanche, directement
inspiré de l'expérience du Lesotho, qui a créé
un compte spécial, séparé du budget de l'Etat, pour
gérer les revenus de ses barrages hydroélectriques. Pourtant,
les Tchadiens ne sont favorables ni à l'une ni à l'autre
de ces méthodes. Plutôt que de se voir imposer une solution
de l'extérieur, ils ont préféré innover et
proposent de répartir les revenus du pétrole comme suit:
80 % iraient à la santé, l'éducation, les infrastructures
et le développement rural, 15 % serviraient à payer les fonctionnaires,
les soldats et le service de la dette et 5 % reviendraient à la
préfecture du Logome oriental, où se trouvent les champs
de Doba. Cette dernière disposition vise à prévenir
une dérive de type Ogoniland. Cette région du Nigeria subit,
comme l'on sait, tous les inconvénients de l'exploitation pétrolière
sans jamais bénéficier des revenus qu'elle dégage.
L'utilisation des dividendes pétroliers serait surveillée
par le Parlement et par un comité composé de dix membres,
comprenant, outre plusieurs membres du gouvernement, des opposants et des
représentants de la société civile. La proposition
de loi est actuellement débattue au Parlement.
Ces dispositions seront-elles suffisantes
pour empêcher que le Tchad ne ressemble, dans dix ans, au Nigeria
ou au Congo ? " Impossible d'être sûr à 100 %, répond
un responsable de la Banque mondiale. A un moment ou à un autre,
il va falloir faire un saut dans l'inconnu. " Cc saut devrait donc avoir
lieu dans le courant de cette année, une fois le tracé de
l'oléoduc renégocié, les plans de compensation bouclés
et l'ordonnance sur la redistribution des revenus votée. Que se
-passerait-il en cas de nouveaux contretemps ? De source tchadienne, on
indique que la population s'impatiente et que de nouveaux délais
pourraient avoir des conséquences imprévisibles. Il n'est
toutefois pas question de renoncer au projet et de tenter d'évacuer
le pétrole de Doba par la Méditerranée, via la Libye.
D'abord parce qu'un tel itinéraire augmenterait considérablement
les coûts de construction. Or l'oléoduc Doba-ICribi, long
de i 050 km, revient déjà à 1,2 milliard de dollars.
Pour atteindre la Méditerranée, il faudrait traverser plus
de 2 000 km de terrain difficile, dans des conditions climatiques épouvantables
les réserves des champs de Doba - 1 milliard de barils - ne justifient
pas un tel investissement.
Selon toute vraisemblance, c'est
donc par Kribi que sera évacué le brut tchadien. Et lorsque
les réserves seront épuisées, l'oléoduc pourra
servir à évacuer le pétrole d'autres champs, situés
plus à l'Est. D'importantes campagnes de prospection sont en effet
engagées dans toute la région, et il n'est pas exclu que,
dans cinquante ans, le lac Tchad devienne une zone aussi convoitée
que les côtes angolaises.
FONDATION CHANTAL BIYA :
Comment mettre à profit la
position et le statut social que confère le titre de première
dame? C'est la question à laquelle un certain
nombre d'épouses de
chefs d'Etat africains s'efforcent de donner une réponse, en fonction
de leur expérience et aussi de leur envie de défendre
les franges les plus exposées des populations. C'est ainsi que pour
jouer un rôle dans les secteurs sociaux, en faveur des enfants, des
handicapés ou plus simplement des défavorisés, organisations
non gouvernementales, associations et fondations fleurissent ces dernières
années sur le continent.
Depuis qu'elle est devenue la première
dame du Cameroun, en avril 1994, Chantal Biya s'est elle aussi trouvé
un rôle de premier plan à jouer dans l'action caritative.
Elle a ainsi décidé de consacrer une part importante de son
temps à ceux de ses concitoyens qui en ont le plus besoin les mères,
les enfants et les populations déshéritées du Cameroun.
Pour centraliser les idées
qui ont jailli dans son esprit, et aussi pour leur impulser l'énergie
indispensable à leur concrétisation, une envie et un besoin
ont vite percé : ceux de créer une fondation qui porterait
son nom. L'idée, qui n'est peut-être pas originale, est en
tout cas diablement efficace. Organisée sous un cadre juridique
favorable aux activités d'intérêt général,
cette activité peut trouver les ressources dont elle a besoin auprès
des personnes physiques et morales et financer des services qui viennent
profiter à ceux qui en sont privés.
Le 23 février 1999, le rêve
caressé par Chantal Biya est devenu réalité, avec
l'inauguration du siège social de la fondation qui porte son nom
à Yaoundé. L'événement a drainé beaucoup
de monde, rue Henri-Dunan, sur le prolongement des installations du principal
établissement hospitalier du pays, l'hôpital central de Yaoundé.
A 11 heures, en première ligne aux côtés de l'épouse
du chef de l'Etat, président de la Fondation, deux invitées
spéciales Jeannette Brutelle Duba, présidente fondatrice
du Centre d'études politiques et de société (CEPS)
de France, et Franca Garcia, présidente de l'Association des épouses
des ambassadeurs africains aux Etats-Unis et aux Nations unies.
Si la première est venue
dans la capitale politique du Cameroun présider la cérémonie
de remise du prix décerné par le CEPS au lauréat 1998,
Paul Biya, cinq jours plus tôt, la seconde est l'un des tout premiers
généreux bienfaiteurs de la Fondation Chantal-Biya. L'association
qu'elle préside avait en effet offert un chèque de 2000 dollars
en octobre 1994, à New York, au profit des oeuvres de la première
dame du Cameroun. Egaiement remarqué à la tribune officielle
ce jour-là, le gratin politique et économique local tous
les ministres en charge des secteurs sociaux, une forte représentation
de l'organisation des femmes du parti au pouvoir (le Rassemblement démocratique
du
peuple camerounais), dont Chantal
Biya est la présidente d'honneur, ainsi que des opérateurs
industriels d'envergure comme Fotso Victor, Louis Yinda, le directeur général
de la Sosucam dont la gestion avisée lui a permis de reprendre la
Cameroon Sugar Company (Camsuco), Tagne Olivier, un homme d'affaires propriétaire
d'une grande clinique privée à Yaoundé, Mbayen René,
un gestionnaire au bras long qui a porté Camship, la société
qu'il dirige depuis des années, vers des eaux favorables, ou encore
le président des élites Bandjoun de Yaoundé.
Le siège social de la Fondation
Chantal-Biya, imposant bâtiment de trois niveaux, que l'on inaugurait
ce 23 février 1999, est en fait un don du gouvernement à
la première dame. Incapable financièrement de terminer la
construction de ce bâtiment depuis une bonne dizaine d'années,
le ministère de la Santé publique avait approché l'épouse
du chef de l'Etat avec l'espoir de réaliser une double opération:
achever un chantier qui agrandit et modernise les installations de l'hôpital
central de Yaoundé et offrir à la toute jeune mais dynamique
fondation un cadre de travail digne de ses missions et à la hauteur
de ses ambitions.
Pari tenu, pari gagné, puisque,
grâce à ses ressources collectées avec un grand sens
de l'organisation et de l'innovation, l'immeuble inauguré fin février
en impose, à la fois par son envergure et par les équipements
qu'il abrite : 4 300 m2 de superficie occupée, une vingtaine de
couveuses ultramodernes, 250 lits pour le Centre Mère et Enfant
inauguré dans la foulée, un personnel médical entièrement
dévoué à la cause de la Fondation, dont plusieurs
médecins de haut niveau.
La Fondation Chantal Biya tient
aussi un centre médical à Mvomeka'a, village natal du chef
de l'état : ce centre administre des soins tout en assurant un rôle
d'éducation des populations.
Sources :
Afrique-Asie
Jeune Afrique
Jeune Afrique Economie
Africa International
Continental

Contenant et contenus conçus et réalisés par Olivier Bain; tirés de l'oubli, toilettés et remis en ligne par Jean-Marc Liotier