
Le vodoun et les vodoun : Origine
« Le Dahomey est incurablement
religieux », a pu écrire Maurice A. Glélé .
Des études sérieuses ont été consacrées
au vodoun dès le début de l' époque coloniale aussi
bien au Dahomey qu'au Togo allemand. Aux grands auteurs étrangers
(Le Hérissé, Maupoil, Herskovits) se sont joints plus tard
des Béninois, tels Paul Hazoumé, Alfred Mondjannagni, plus
récemment encore les pères Jacob Agossou et Barthélémy
Adoukonou.
Un nom encore s'impose, en plus
des écrivains et chercheurs proprement dits. Car, si l'homme n'était
pas africain, il l' était devenu plus qu' aucun autre étranger
et dans des circonstances exceptionnelles: Pierre Verger ( 1902-1996),
photographe de talent, a découvert l' Afrique à la fin de
1935 et consacré dix-sept ans de sa très longue vie à
l'étude et à l'illustration de la religion vodoun. Cas exceptionnel,
il en gravit progressivement tous les degrés d'initiation, poursuivant
sa quête outre-Atlantique, notamment au Brésil à Salvador
de Bahia où il avait fini par se fixer. Il nous laisse aujourd'hui
65000 clichés représentant 50 ans de travail, et son oeuvre
considérable a fait, de son vivant déjà, l' objet
de recherches universitaires.
Toutefois, au-delà des images,
et puisque le Bénin en est vraisemblablement le berceau, il faut
essayer d' indiquer , même rapidement, le contenu d'un monde spirituel
fantastique, partiellement secret, complexe et encore mal appréhendé
dont les détracteurs continuent, apparemment non sans raison, de
s'inquiéter. Rien d'étonnant à cela. Si le vodoun
demeure lourd de mystères, c'est bien parce qu'il s'enferme à
plaisir dans ses interdits. Incommunicabilité ? Les exigences initiatiques
imposent à l'investigateur « perspicacité, persévérance,
humilité », reconnaît encore un journaliste béninois
en 1991. En supposant même qu'il soit ouvert, plus accessible, plus
explicite, il n'est pas simple.
Particulièrement bien implanté
au Sud-Bénin et au Sud Togo voisin, est-il venu de l'est avec les
Yoruba/Nago ? ou de l'ouest avec les Adja Tado sous le règne de
Tégbessou au XVIIIe siècle ? Mais si les Adja Tado ont eux-mêmes
une origine commune avec les Yoruba, nous demandions-nous quelques chapitres
plus haut, les deux sources, tardivement rassemblées, seraient-elles
alors complémentaires ? Le panthéon mina-fon-yoruba est en
tout cas sensiblement le même et un de ses éléments
majeurs, le Fa décrit un peu plus loin, est incontestablement d'origine
yoruba.
Sous l'autorité d'un couple
créateur Mawou-Lissa, plutôt flou, lointain, si peu familier
des humains que ceux-ci ne s'adressent presque jamais à lui directement,
tout ce qui dans la nature peut être considéré comme
l'expression de la volonté ou de la création divines se trouve
à son tour divinisé: animaux, végétaux, minéraux,
montagnes, sources, rochers, air, feu, vent, arc-en-ciel, foudre, pluie,
grêle, cours d'eau et principales maladies, telles la variole, la
lèpre, la néphrite.
Du coup, le mot « vodoulvodoun
» désigne aussi chacun de ces innombrables « fétiches
», objets çà et là de rituels d'adoration très
pragmatique s'accompagnant toujours de libations, d'offrandes et de sacrifices.
Aux principaux vodoun interethniques relativement bien connus dans l' ensemble
de la région s'ajoutent des vodoun locaux purement ethniques, et
encore d'autres divinités des sociétés secrètes.
Paul Hazoumé présente par exemple, dans Doguicimi, les sept
fétiches propres à Abomey.
Les rois et les grands ancêtres
eux-mêmes, une fois disparus, deviennent vodoun à leur tour,
objets chacun d'un culte familial, privé et spécifique, distinct
des cultes célébrés à l'intention des vodoun
publics. On connaît bien les attributs, les danses et les symboles
particuliers des plus importants de ceux-ci (qui, comme les dieux grecs
et romains, portent d'ailleurs un double nom yoruba et adja-éwéfon)
: Sakpata, vodoun maître de la Terre, nourrit les hommes du grain
des récoltes mais, quand il se fâche et veut les punir, les
leur colle sur la peau; « roi des perles », il est donc aussi
maître de la variole.
Hèbiosso, qui règne
sur le ciel, le tonnerre et les éclairs, foudroie les criminels;
ses prêtresses agitent en dansant une double hache très caractéristique
qui symbolise en fait un bélier cracheur de foudre. Shango/Ogoun,
vodoun des métaux, du fer et de la forge, reçoit les hommages
de tous ceux qui fabriquent ou utilisent les objets en fer, à commencer
évidemment par les forgerons.
Un autre culte plus familial et
plus caché, celui des tohossou par exemple, vise d'étranges
créatures aquatiques censées perpétuer le souvenir
d'enfants royaux nés anormaux et noyés pour cette raison
dans une source ou un marigot, ce qui expliquerait probablement les infanticides
d'autrefois au royaume d'Abomey... et d'aujourd'hui encore lorsqu'on en
signale.
A qui craint la mort, doute de son avenir ou hésite sur une décision à prendre, il est toujours loisible de consulter les oracles du Fa. Ce système divinatoire venu d'lle-Ife et donc d'origine yoruba est étroitement associé à la religion traditionnelle et constitue lui aussi un vodoun honoré d'un culte particulier célébré au coup par coup lors de chaque consultation. De nombreux ouvrages ont été consacrés à cette technique très élaborée, pratiquée à partir de 16 signes principaux et 240 signes secondaires par des devins et célébrants spécialistes, les bokonon, disposant du matériel approprié : plateau de bois, chapelet, 36 noix de palme, bâtonnets, sacs, autels portatifs et un peu de poudre de kaolin pour saupoudrer le plateau porte-signes, à moins qu'on n'ait dessiné ceux-ci sur le sable.
La dimension cachée du vodoun
couvre des activités inquiétantes qui n'ont pas manqué
de susciter très tôt jugements indignés, condamnations
catégoriques et mises hors la loi plus ou moins efficaces: rituels
initiatiques ou sacrificiels secrets, enlèvements et empoisonnements
d'enfants et d'adultes, mises à mort de victimes consentantes ou
punies pour désobéissance et bavardages intempestifs à
l'extérieur, dictature sans pitié des féticheurs sur
leurs ouailles, en général, leurs novices, leurs servantes
et leurs auxiliaires en particulier. Graveleux ou terrifiants, difficilement
contrôlables, ces faits divers ne sont jamais longtemps absents des
colonnes de la presse locale, notamment de la presse populaire à
sensation beaucoup plus développée au Ghana et en Nigeria
qu'au Bénin.
Que révèle l'univers
vodoun au voyageur un peu attentif ? On a signalé, à propos
du Sud, son empreinte religieuse multiple sur le paysage rural: les théories
de jeunes canéphores, vodounsi initiées ou servantes, remontant
du marigot ; les legba poussiéreux ou paillards au coin des bois
sacrés et aux croisements de pistes; le temple des pythons de Ouidah
à deux enjambées à peine de la basilique catholique
; et les nombreux enclos, résidences de prêtres Vodounnon
et devins bokonon, temples et autels ornés de peintures polychromes
au hasard des villages.
Rien que sur les legba il y aurait
beaucoup à dire. Comment ces personnages grotesques, qu'on dit méchants,
agressifs, inspirateurs de haine, de jalousie et de mauvaises actions,
peuvent-ils être en même temps gardiens bienveillants des maisons,
des villages et des carrefours ? Grimaçants, obscènes, défiant
toute pudeur, ils font rire, assure t-on, mais ne suscitent-ils pas plutôt
la peur quand on les voit vengeurs, incendiaires, capricieux, furieux,
brandissant massue ou couteau ?
De son côté, le culte particulier du python Dangbè a été apporté, en même temps que celui d'un nain mythique à neuf têtes, par les Houèda de Hindji et de Savè ; ou alors par les Yoruba d'Ile-Ife, et l'on replonge dans l'incertain.
Il rend en tout cas hommage au serpent
en tant qu' incarnation de l'Etre suprême.
« C'est Dangbè qui
a ouvert les yeux à l'univers et permis à l'humanité
de venir au monde »
Inoffensif quand il est exhibé
par ses adorateurs, le pythons se prête à d'étranges
contorsions qui font évidemment frémir plus d'un visiteur
étranger. On dit que sa morsure éventuelle serait simplement
annonciatrice de bienfaits et comme une vaccination contre d'autres vraiment
dangereuses.
Moins inoffensive probablement dans
ses applications, la croyance fortement ancrée en l'impossibilité,
l'anormalité des morts naturelles pousse les prêtres du vodoun
et les familles des défunts à toujours rechercher un(e) coupable,
meurtrier, empoisonneur ou malfaisant, réel ou supposé, qu'ils
s'arrogent le droit de punir.
Par ailleurs, si l'âme est
considérée comme immortelle, les pensionnaires résidents
de la Cité des Morts sont privés à jamais de toute
communication avec le monde des vivants... à moins que ceux-ci ne
leur dépêchent comme messagers des victimes immolées
à cet effet, plus souvent consentantes qu'on ne voulait bien l'admettre,
fiers en somme de l'ultime mission qui leur était confiée.
Ce serait là l'origine des multiples sacrifices humains introduits
à Abomey -dit la tradition -par le huitième roi Adaza. Mais
quelle est la part, dans cette pratique désastreuse pour la réputation
du royaume à l'extérieur, des calculs d'une vulgaire et basse
politique permettant notamment d'éliminer sans peine tous les gêneurs
et contempteurs du pouvoir ?
Peut-on dire qu'après un long temps de suspicion et d'ignorance, le vodoun est sorti définitivement démystifié, réhabilité, du 1 er « Festival des cultures vaudou » de Ouidah en 1993 ? Soyons prudents. Au-delà d'une grande fête un peu pagailleuse et désordonnée (ironiquement surnommée par certains « le bal poussière de Soglo » !), on a certainement dépassé la notion simpliste, méprisante, de « culte fétichiste primitif », admettant désormais le vodoun en tant que fait culturel complexe, majeur, digne d'une étude scientifique qui satisfasse aux normes exigeantes de l'ethnologie religieuse.
Ceci dit, gare au vodoun ! Le cri
d'alarme a été de nouveau poussé. Déjà
le régime de la République populaire du Bénin, prônant
l'athéisme, avait pris position dans le discours d'Abomey de 1974
contre les religions en général et lancé un peu plus
tard une campagne particulièrement destinée à déraciner
« les forces du mal et les croyances rétrogrades ».
Sans grand succès. Toutes les interdictions ont été
levées par Soglo en 1989 mais on continue, çà et là,
avant tout dans les milieux catholiques les plus triomphants et les plus
rigides, à s'inquiéter de ces pratiques rampantes, dénoncées
comme pseudo-scientifiques, attardées, et à l' occasion,
criminelles.
L'Église catholique, vent
en poupe, dit en tout cas haut et fort qu'elle n'en veut plus, par la voix
de l'écrivain Jean Pliya, catholique militant :
«L'animisme... au Bénin...
a pour nom vaudou. Celui-ci connaît aujourd'hui un regain qui m'inquiète.
Autour du Vaudou se construit en effet une forme de vie marquée
par le secret, le règlement de comptes, l'empoisonnement. Ce ne
sont pas là des valeurs d'avenir, des valeurs épanouissantes...
Le vaudou n'encourage pas l'éducation scolaire, il enferme les enfants
dans les couvents... En tant que chrétien, il faut que je puisse
proposer autre chose »
Certains sociologues confirment
effectivement la peur, parfois aussi la honte, inspirées en milieu
rural par la terrible toute-puissance des vodounnon, peur des recrutements
forcés de novices, peur du secret, peur des prélèvements
obligatoires, peur des séances de transe, peur de l' empoisonnement
et de la folie. Il n ' est donc pas certain que la démocratie béninoise
ait gagné à revenir sur les interdictions du régime
populaire. Apparemment les villages du Sud les approuvaient plus largement
qu'on a d'abord pu le penser. Le clergé et les fidèles du
vodoun sauront-ils, voudront-ils, prendre position face à la modernité,
face au développement ? Pour l'instant, deux rivaux inconciliables
s'en disputent la direction, mais le vodoun a fini par obtenir , non sans
mal, son « Noël des animistes », la fête religieuse
chômée annuelle qu'il avait demandée pour le 10 janvier.
Le Bénin, Philippe David
LE VAUDOU A HAÏTI
- Histoire
C'est au XVIIe siècle, sous l'impulsion de Colbert, que la France imposa sa présence dans l'île, prenant peu à peu aux Espagnols le contrôle de sa partie occidentale. Cap-Haïtien, la première capitale d'Haïti fut fondée en 1670. L'économie reposait à l'époque sur le commerce triangulaire mis en place par les armateurs de Bordeaux, Nantes, La Rochelle. Les négriers importaient des esclaves noirs pour travailler sur les plantations de canne à sucre et réimportaient le sucre raffiné en Europe. À la veille de la Révolution française, il y avait environ 600 000 esclaves en Haïti. En août 1791, la révolte générale des Noirs éclata. Le pays devint un champ de bataille où s'affrontaient les armées noires conduites par le général haïtien Toussaint-Louverture, les armées des planteurs, les armées de mulâtres de Pétion. Craignant «de voir passer dans des mains ennemies la propriété de Saint-Domingue», le commissaire de la Convention, Santhonax, proclama la liberté des esclaves le 29 août 1793, pour la province du Nord, et le 4 septembre dans la province du Sud. Le 2 février 1794 (6 pluviôse an II), la Convention confirma cette déclaration et étendit l'abolition de l'esclavage à toutes les colonies françaises. Toussaint-Louverture se rallia alors au gouvernement français, il fut nommé général de la République et gouverneur de l'île. La menace du rétablissement de l'esclavage sous le Directoire, l'amena à reprendre les armes contre la France. En 1802, il fut fait prisonnier par les Français du général Leclerc et mourut en France au fort de Joux où il était détenu.
L'idée de l'indépendance survécut à Toussaint-Louverture. Dès 1803, un autre Noir, Jean-Jacques Dessalines, expulsa les derniers Français, proclama l'indépendance de l'île d'Hispaniola, qui devint Haïti, et prit le titre d'empereur en 1804 (Jacques Ier). Après l'assassinat de Dessalines, en 1806, le pays se scinda en deux : au nord, un royaume dirigé par Henri Christophe, au sud une république gouvernée par un mûlatre Alexandre Sabès, dit Pétion. Le successeur de Pétion, Jean-Pierre Boyer, parvint à réunifier les deux parties de l'île en 1822. En 1844, l'Est fit définitivement sécession, et devint la république de Saint-Domingue, tandis que l'Ouest devenait la république d'Haïti.
De l'influence française à l'occupation américaine (1844-1915)
Les premiers temps de l'histoire
d'Haïti furent difficiles, marqués par d'insolubles luttes
de pouvoir entre les Noirs et les mulâtres. Encore dépendante
de la France qui réclamait une indemnité financière
pour reconnaître son indépendance, Haïti ne parvenait
pas à se stabiliser politiquement. Les problèmes agraires
engendrèrent, dès 1844, une grande jacquerie, dite «des
piquets», qui fut durement réprimée. En 1849, Faustin
Soulouque, un Noir, se proclama empereur (Faustin Ier) et se lança
dans une sévère répression contre les mulâtres.
Il régna en despote sur le pays pendant dix ans, avant d'être
renversé, en 1859, par le mulâtre Nicolas Geffrard, qui restaura
la république et gouverna le pays jusqu'en 1867.
Jusqu'en 1910, le pays, gouverné
exclusivement par des mulâtres, connut une période de prospérité
relative. Les États-Unis, déjà présents en
République dominicaine, commencèrent alors à s'intéresser
à cette île prometteuse. Les compagnies américaines
dès 1906 commencèrent à construire des voies ferrées
et à exproprier les paysans sans titres de propriété.
Les États-Unis occupèrent militairement Haïti le 28
juillet 1915. En 1918, tout le pays était en état d'insurrection.
On estime que la guérilla fit 15 000 morts.
L'émergence du pouvoir militaire (1915-1957)
Washington mit alors en place un
gouvernement soumis à ses volontés et s'engagea en contrepartie
à fournir au pays une assistance politique et économique.
Les travaux de modernisation furent
accélérés (mise en place d'une infrastructure routière,
amélioration des techniques agricoles, développement du réseau
téléphonique) mais cette marche forcée vers la modernité
se fit au détriment des couches les plus défavorisées
de la population. L'hostilité de la population à l'égard
de l'occupant ne cessait pas, et conduisit finalement, en août 1934,
au départ des Américains. Haïti n'en avait cependant
pas fini avec l'influence américaine. La fin de l'occupation, ajoutée
aux conséquences de la crise économique mondiale, engendra
le retour à l'instabilité, et encouragea les velléités
dictatoriales.
Arrivé au pouvoir par un
coup d'État en août 1945, Dumarsais Estimé fut renversé
en novembre 1949 par une junte militaire. Le pouvoir resta entre les mains
de l'armée jusqu'en septembre 1957, date à laquelle François
Duvalier (dit «Papa Doc»), un ancien membre du gouvernement
Estimé, fut élu président.
La dictature des Duvalier
Élu avec le soutien des Noirs,
qui voyaient en lui le moyen de lutter contre les élites mulâtres,
Duvalier imposa d'emblée une politique extrêmement répressive
(interdiction des partis d'opposition, instauration de l'état de
siège, le 2 mai 1958) et reçut du Parlement l'autorisation
de gouverner par décrets (31 juillet 1958).
Le régime Duvalier s'appuyait
sur une milice paramilitaire, les Volontaires de la Sécurité
nationale, surnommés les «tontons macoutes», qui neutralisa
l'armée, sema la terreur dans les rangs de l'opposition et parvint
à étouffer toute résistance. Duvalier prononça
la dissolution du Parlement le 8 avril 1961 et les États-Unis suspendirent
leur aide en signe de désapprobation.
Face à l'opposition d'une partie de l'armée (un complot militaire fut déjoué le 19 avril 1963) et des exilés haïtiens, qui tentèrent plusieurs fois, depuis la République dominicaine, de provoquer un soulèvement populaire, Duvalier renforça la répression. En 1964, il se proclama président à vie et engagea, avec les tontons macoutes, une campagne sanglante d'assassinats contre les opposants (2 000 exécutions en 1967).
Duvalier ne laissa rien au hasard
: en janvier 1971, l'Assemblée nationale amenda la Constitution
pour lui permettre de désigner son fils, Jean-Claude, comme successeur.
À la mort du dictateur, le 21 avril 1971, Jean-Claude Duvalier accéda
donc à la présidence de la République. Il avait 19
ans (d'où son surnom de «?Baby Doc?»). Il commença
par appliquer la politique de son père, avant d'amorcer une timide
libéralisation du régime.
La répression et l'extrême
pauvreté dans laquelle le régime maintenait la population
provoquèrent, à partir de la fin des années soixante-dix,
l'exode de la population haïtienne, vers la Floride et les Bahamas
notamment. En 1986, un soulèvement populaire renversa Jean-Claude
Duvalier, qui partit se réfugier dans le sud de la France.
La fin de l'ère Duvalier ne signifiait pas pour autant la fin de la dictature. Aussitôt après son départ, une junte militaire dirigée par le général Henri Namphy s'installa au pouvoir. L'élection de Leslie Manigat à la présidence de la République, en 1988, ne fut qu'une parenthèse avant un nouveau coup d'État militaire du général Namphy (juin), lui-même remplacé en septembre par le général Prosper Avril. Au pouvoir jusqu'en 1990, celui-ci dut faire face à de nouvelles révoltes. Sa démission ouvrit la voie à des élections sous contrôle international, et à un semblant de normalisation de la vie politique.
Un timide retour à la démocratie (1990-1997)
Jean-Bertrand Aristide, un prêtre
catholique qui s'était fait l'avocat des pauvres, remporta une brillante
victoire en décembre 1990. Son accession à la présidence
de la République redonna espoir au peuple haïtien mais, en
septembre 1991, il fut renversé par un coup d'État militaire
et partit se réfugier aux États-Unis.
Quant aux milliers de boat people
haïtiens qui tentaient de gagner les États-Unis, ils furent
pour la plupart refoulés par les garde-côtes américains.
L'Organisation des États américains (OEA), puis l'Organisation
des Nations unies (ONU) décrétèrent des sanctions
contre le nouveau régime militaire du général Raoul
Cédras. Le pays fut soumis à un blocus économique
à partir de 1993. La situation alimentaire et sanitaire se dégradait,
et les négociations pour le retour d'Aristide se prolongeaient.
Finalement, les États-Unis
décidèrent une intervention militaire. Les troupes américaines
débarquèrent en Haïti le 19 septembre 1994. La junte
militaire dut quitter le pouvoir et le président Aristide fut rétabli
dans ses fonctions en octobre 1994. Son mandat touchait cependant à
sa fin et la Constitution ne l'autorisait pas à en briguer un second.
Élu en décembre 1995,
l'ancien Premier ministre René Préval prit ses fonctions
en février 1996. Il tenta de remettre en état les infrastructures
du pays et mit en route une réforme agraire. Une visite, en mai
1996, à Saint-Domingue permit la mise en place d'une commission
bilatérale chargée de gérer les contentieux entre
les deux pays. À l'intérieur, le gouvernement haïtien
a dû faire face à une opposition, regroupée autour
de l'ancien président Jean-Bertrand Aristide dont le parti a refusé
les privatisations d'entreprises publiques imposées par les investisseurs
internationaux et s'est autoproclamé victorieux lors des élections
partielles sénatoriales d'avril 1997. Pour protester contre la fraude
électorale, le Premier ministre Rosny Smarth a démissionné
en juin 1997. Après le refus par le Parlement de ratifier la nomination
d'Eriq Pierre en juillet 1997 et celle d'Hervé Denis en décembre
1997 et en avril 1998, Jacques-Édouard Alexis, ministre de l'Éducation,
a finalement été désigné Premier ministre,
en juillet 1998. Mais ce n'est que le 26 mars 1999, après 21 mois
de crise, émaillée de graves incidents (plusieurs assassinats
politiques), que le président René Préval et cinq
partis d'opposition sont parvenus à un accord pour former un nouveau
gouvernement dirigé par Jacques-Édouard Alexis. Sa première
mission a été d'organiser les prochaines élections
législatives qui devraient avoir lieu à l'automne 1999. Plusieurs
fois reportées, celles-ci se sont tenues en mai 2000. Lors du premier
tour le parti la Famille Lavalas a revendiqué la victoire, mais
le président du Conseil électoral provisoire a refusé
d'entériner les résultats ce qui a replongé le pays
dans la crise.
Encyclopédie Microsoft Encarta
2001
- Religion vaudou
Religion de Haïti, également
pratiquée à Cuba, à Trinité, au Brésil
et dans le sud des États-Unis, en particulier en Louisiane. Importé
par les esclaves noirs d'Afrique de l'Ouest, notamment du Dahomey (auj.
Bénin), le vaudou est un système de croyances dans lequel
sont intégrés de manière syncrétique des éléments
du catholicisme. Le culte vaudou est dédié aux esprits nommés
Loa, généralement assimilés aux saints de la religion
catholique romaine (par exemple, Damballah Oueddo, le serpent arc-en-ciel,
est apparenté à saint Patrick), ainsi qu'aux Zaka, dieux
des travaux de la terre et aux Guede, esprits des morts. L'utilisation
des cierges, des cloches, des croix et des prières de même
que la pratique du baptême et du signe de croix sont empruntées
directement au catholicisme romain. Les danses, les tambours et la vénération
des ancêtres proviennent à leur tour des religions animistes
d'Afrique.
Les rites du vaudou sont célébrés
par un prêtre, appelé hougan, ou une prêtresse, appelée
mambo. Pendant les rites, les participants invoquent les Loa en jouant
du tambour, en dansant, en chantant et en festoyant, et les esprits prennent
possession des danseurs. Alors que ceux-ci adoptent des attitudes caractéristiques
des esprits qui les possèdent, les Loa guérissent les malades
et leur transmettent des recommandations diverses pendant la danse extatique.
C’est une religion développée
et pratiquée par les esclaves et les noirs libérés
à Haïti ; dans la constitution de 1987, cette religion a été
reconnue comme la religion nationale du pays.
Les esclaves appartenaient à
plus d’une centaine de groupes ethniques différents : ils ont pu
s’unir grâce à une religion africaine recrée : le vaudou.
Les colonisateurs ont systématiquement
mélangés les esclaves de sorte qu’il est difficile de trouver
l’origine exacte des ethnies présentes (à la base, les esclaves
ne parlaient pas la même langue). Les colonisateurs ont imposé
les valeurs européennes et le catholicisme romain aux esclaves.
Ceux-ci ont été forcé « d’adorer » leurs
dieux africains secrètement et de cacher leurs attachements profonds
à la religion ancestrale. En fait, toutes les interdictions imposées
par les européens ont abouti à une revalorisation des valeurs
culturelles africaines.
Ce regroupement autour d’un idéal
et d’un passé commun a joué un rôle important dans
la vie politique haïtienne et a permit l’émergence de mouvements
de masse, qui se sont révélés déterminants
dans la lutte pour l’indépendance et plus tard dans le renversement
du dictateur Duvalier en 1986.
En 1791, la création du congrès
politique et rituel du « Bois Caiman Voudou », dirigé
par Boukman, aboutit au soulèvement des esclaves et à la
guerre de libération. Mais les pratiquants du vaudou continuèrent
à subir des persécutions en 1896, 1913 et 1941 (les campagnes
contre la superstition aboutirent aux massacres de centaines de personnes).
La période d’occupation américaine (1915-1934) ainsi que la période post Duvalier vit se perpétrer des persécutions importantes à l’encontre des pratiquants du vaudou. Le catholicisme romain demeura l’unique religion officielle du pays jusqu'à la constitution de 1987 qui reconnut le vaudou comme la religion nationale du pays.
Le vaudou est originaire du Dahomey
(actuellement Bénin, Nigeria et Togo) et provient d’un mot de l’ethnie
des Fon qui signifie dieu ou esprit.
Le vaudou est un système
complexe de connaissance qui n’a rien à voir avec les visions simplistes
qui consistent soit à planter des aiguilles dans des poupées
ou à transformer des innocents en zombies. C’est une forme organisée
de support communautaire qui apporte une signification à l’expérience
humaine en relation avec les forces naturelles et supra-naturelles de l’univers.
Le vaudou partage certains éléments
avec d’autres religions. Les pratiquants du vaudou croient à l’harmonie
créatrice et aux valeurs positives. Le vaudou est le ciment qui
lie la vie familiale et communautaire à Haïti.
C’est une religion monothéiste
qui ne reconnaît qu’un dieu unique ou entité suprême
spirituelle, connue sous le nom de « Mawu-Lisa » chez les Fon,
Olorun chez les Yorouba et Bondye ou Gran Met à Haïti. La religion
haïtienne prend ses sources rituelles parmi plusieurs groupes ethniques
: les Yorouba, les Fon, les Igbo, les Hausa, les Ewé et les Kongo.
Elle a intégré des éléments étrangers
dans sa structure.
Les pratiquants du vaudou utilisent
des prières catholiques romaines, des cantiques au début
de chaque cérémonie et se servent du calendrier Grégorien
pour marquer les fêtes des lwas (esprits intermédiaires entre
les humains et dieu, qui ont été lié à l’iconographie
et aux histories des saints catholiques romains).
Pour les « serviteurs »
des esprits, il n’y a pas de conflit entre le vaudou et le catholicisme
romain. Le syncrétisme demeure donc un trait important de la religion
vaudou.
En plus des dimensions culturelles
et spirituelles, exprimées à travers les arts (musique et
danse), l’enseignement vaudou et le système de croyance incluent
des composants sociaux, économiques, politiques et pratiques. Par
exemple, le vaudou se pose la question de savoir ce qui peut être
fait en cas de maladie dans un pays qui compte 1 médecin pour 23
000 personnes, ou ce qui doit être fait lors d’une prise de décision
importante (mariage, affaires, voyages à l’étranger...).
La plupart des cérémonies
vaudou se conforment à un ou deux rites principaux. Le rite du
Rada (originaire du vieux royaume du Dahomey) est le plus fidèle
quant à la tradition ouest-africaine. Le rite du Pétro
a
connut un développement plus récent et est issu du système
de plantation du Nouveau Monde. Il inclut des éléments de
la culture Kongo ainsi que les pratiques de nombreux autres groupes de
l’Afrique centrale à l’Angola.
Le rite du Rada est le rite vaudou
le plus élaboré. Il inclut les grands esprits communautaires
ou lwas, tels que Atibon Legba, Marasa Dosou Dosa, Ayida Wedo, Azaka Mede,
Agwe Tawoyo, Gede Nimbo.... Il est généralement admis, par
les pratiquants du vaudou, que les lwa-Rada sont de « bons »
esprits. Ces « fle Ginen », ou vrais esprits d’Afrique, sont
les premiers lwas à être salués pendant les cérémonies.
Paisibles et bienveillants, les Rada sont vénérés
dans les " hounfor" (temples) selon des rites propres, ouverts au public.
Ils sont considérés comme des forces bénignes, souvent
favorables.
Les lwas de type Pétro-Congo
sont plus « violents ». Associés au feu, on dit qu’ils
sont « Lwa cho » (les Lwas chauds). Ils ont des comportements
« puissants » (forceful). Ils sont liés aux aspects
plus violents et passionés du peuple haïtien : la passion,
la colère, la vengeance et la mort. Jugés comme violents
et impulsifs, la croyance veut leurs services soient plus puissants que
ceux des Rada mais également plus risqués. Les exigences
des Pétro sont plus grandes que celles des Rada : ils exigent des
sacrifices de chèvres, de vaches, de chiens, parfois de cadavres
et de porcs.
Le rite du Pétro comporte
des Lwas importants tels que Met Kalfou, Simbi Andezo, Ezili Danto et Bawon
Samdi.
Certains Lwas existent en «
andezo », ou en deux substances cosmiques et servent à la
fois aux rites Rada et Pétro.
La possession, qui représente
une dimension importante de l’adoration vaudou, est l’aspect le moins bien
compris de cette religion. A travers la possession, les lwas et la communauté
s’affirment. Les participants (en particulier les prêtres et les
prêtresses, ou houngans et manbos, ainsi que les initiés,
ou ounsis) transcendent leur aspect matériel pour devenir des esprits.
Les esprits renouvellent leur vigueur en dansant et en fêtant avec
les chevaux (chwal), car il est dit que durant la possession le lwa chevauche
une personne comme un cavalier monte un cheval.
La possession est une période
durant laquelle le lwa communique avec le peuple.
Durant ces dernières années,
des groupes musicaux d’inspiration vaudou sont nés ; citons Boukman
Eksperyans, Boukan Ginen, les Fugees...
En 1997, une conférence réunissant
des pratiquants et des spécialistes du vaudou s’est tenue à
l’université de Californie (Santa Barbara) ; ils se sont rencontrés
pour discuter du rôle du vaudou dans le développement d’Haïti
et ont crée le Congrès de Santa Barbara chargé d’étudier
le vaudou haïtien.
Source : Microsoft Africana, 2000
Pour continuer à étudier
le vaudou sur le Net :
La
médecine vaudou à Haïti
Liens
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Contenant et contenus conçus et réalisés par Olivier Bain; tirés de l'oubli, toilettés et remis en ligne par Jean-Marc Liotier